• L'Évêque de Börglum et ses chevaliers

    Contes d'Andersen
    Sur la côte sauvage du Danemark, là où le vent souffle fort et où les vagues se brisent avec fracas, se dressait autrefois un grand et fier château. Ce n'était pas n'importe quel château, c'était celui de l'Évêque de Børglum.

    Cet Évêque était un homme très important et très riche. Il avait beaucoup de terres, beaucoup d'or, et aussi beaucoup de chevaliers. Ces chevaliers, vêtus de leurs armures brillantes, étaient toujours prêts à obéir à leur maître, l'Évêque. Ils étaient grands et forts, et parfois un peu rudes.

    Un jour, une terrible tempête se déchaîna sur la mer du Nord. Le vent hurlait comme un loup affamé et les vagues étaient hautes comme des montagnes. Un grand navire, chargé de marchandises précieuses, luttait courageusement contre les éléments. Mais hélas, la tempête fut la plus forte. Le navire craqua, gémit, et finit par faire naufrage non loin du château de l'Évêque.

    Quand la nouvelle arriva aux oreilles de l'Évêque, ses yeux brillèrent. À cette époque, il y avait une loi un peu étrange qui disait que tout ce qui s'échouait sur la plage après un naufrage appartenait au seigneur du lieu. L'Évêque se frotta les mains et dit à ses chevaliers : "Allez vite sur la plage ! Récupérez tout ce que la mer nous apporte !"

    Les chevaliers obéirent. Ils descendirent sur la grève où les débris du navire et les marchandises étaient éparpillés. Il y avait des coffres, des étoffes, des épices... un vrai trésor ! Les pauvres marins qui avaient survécu grelottaient sur le sable, mais l'Évêque et ses hommes étaient bien plus intéressés par les richesses. Ils prirent tout, sans se soucier beaucoup des malheureux naufragés. Certains disent même qu'ils n'ont pas été très gentils avec eux.

    Parmi les gens du château, il y avait un jeune homme, un parent de l'Évêque, qui s'appelait Jens. Il avait bon cœur et fut très triste de voir comment on traitait ces pauvres gens. Il aurait voulu les aider, leur donner des couvertures chaudes et de la nourriture, mais l'Évêque était trop puissant et ne voulait rien entendre.

    Le temps passa. L'Évêque devint encore plus riche grâce aux trésors du navire. Mais les gens du pays chuchotaient que ce n'était pas bien d'avoir profité du malheur des autres.

    Et puis, une nuit, une autre tempête, encore plus violente que la première, s'abattit sur la côte. Le vent secouait le château de Børglum dans tous les sens. Les vagues montaient, montaient, comme si la mer voulait reprendre ce qu'on lui avait volé. On raconte que cette nuit-là, le château de l'Évêque et tout ce qu'il contenait fut englouti par les sables mouvants ou par la mer en furie. L'Évêque et ses chevaliers disparurent avec.

    Depuis ce temps-là, les pêcheurs et les gens qui vivent près de l'ancienne Børglum disent que, les nuits de grande tempête, on peut encore entendre quelque chose d'étrange. Si on tend bien l'oreille, on peut percevoir le bruit des sabots de chevaux galopant sur la plage, le cliquetis des armures et parfois même la voix autoritaire de l'Évêque. Ce seraient l'Évêque de Børglum et ses chevaliers, condamnés à errer pour toujours, cherchant sans cesse de nouveaux trésors dans les vagues, sans jamais trouver le repos. Et c'est pourquoi, même aujourd'hui, on parle encore de l'Évêque de Børglum et de ses hommes.

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