Au cœur d'un royaume verdoyant, où les oiseaux chantaient plus joyeusement qu'ailleurs, vivait une princesse d'une beauté éblouissante. Mais voilà, cette princesse, aussi jolie soit-elle, avait un petit défaut : elle était terriblement fière et se moquait de tout le monde.

Quand les princes des royaumes voisins venaient pour demander sa main, elle leur trouvait toujours quelque chose à redire. L'un était trop rond, elle l'appelait "Prince Tonneau". Un autre était trop grand et mince, elle le surnommait "Prince Perche". Un jour, un jeune roi charmant se présenta. Il avait un menton qui pointait juste un tout petit peu, un peu comme le bec d'un oiseau qu'on appelle une grive. Aussitôt, la princesse s'écria en riant : "Oh, regardez celui-là ! On dirait le Roi Bec-de-Grive !" Et ce nom lui resta. Le pauvre roi repartit, le cœur gros.

Le père de la princesse, le vieux roi, finit par se fâcher très fort. "Puisque tu te moques de tous les nobles princes," dit-il, le front plissé, "eh bien, tu épouseras le premier pauvre homme qui passera devant notre porte !"

Quelques jours plus tard, on entendit une jolie mélodie sous les fenêtres du château. C'était un musicien ambulant, avec des vêtements simples et un luth à la main. Le roi, pour tenir sa promesse, fit appeler le musicien. La princesse pleura, supplia, mais rien n'y fit. Elle dut épouser le musicien.

Ils quittèrent le château à pied. La princesse n'avait jamais marché aussi longtemps de sa vie. Ils traversèrent une immense et belle forêt.
"À qui est cette magnifique forêt ?" demanda la princesse.
"Au Roi Bec-de-Grive," répondit le musicien. "Si tu l'avais épousé, elle serait à toi."
"Oh là là," soupira la princesse, "si j'avais su !"

Plus loin, ils virent une prairie verdoyante remplie de fleurs.
"Et cette jolie prairie, à qui est-elle ?"
"Au Roi Bec-de-Grive," dit encore le musicien. "Si tu l'avais épousé, elle serait à toi."
"Pauvre de moi," pensa la princesse, "quelle sotte j'ai été !"

Enfin, ils arrivèrent devant une grande ville animée.
"Cette ville splendide, elle est à qui ?"
"Au Roi Bec-de-Grive," répondit-il. "Si tu l'avais épousé, elle serait à toi."
La princesse se sentait de plus en plus triste de s'être moquée.

Ils arrivèrent enfin à une toute petite cabane, vraiment minuscule. "Voici notre maison," annonça le musicien. La princesse dut apprendre à faire le feu, à cuisiner, à nettoyer. Elle qui n'avait jamais rien fait de ses mains ! Ce n'était pas facile du tout. Son mari lui demanda de tresser des paniers pour les vendre, mais ses doigts délicats n'y arrivaient pas bien. Alors, il lui dit d'essayer de vendre des pots en terre au marché. Mais un jour, des soldats à cheval passèrent trop vite et cassèrent toute sa marchandise. La princesse se mit à pleurer.

"Tu n'es vraiment douée pour rien," lui dit son mari, un peu déçu. "J'ai trouvé une place pour toi au château du roi. Tu pourras aider dans les cuisines."
Alors, la princesse devint aide-cuisinière. Elle lavait la vaisselle, épluchait les légumes, et parfois, elle cachait des petits restes de nourriture dans ses poches pour les ramener à la maison, car ils n'avaient pas grand-chose à manger.

Un jour, on annonça une grande fête au château : le Roi Bec-de-Grive allait se marier ! La princesse regardait les préparatifs avec un pincement au cœur. Quand le bal commença, elle se cacha dans un coin pour admirer les belles robes et les danseurs.
Soudain, un roi magnifiquement habillé s'approcha d'elle. C'était le Roi Bec-de-Grive lui-même ! Il l'invita à danser. La princesse eut tellement honte, mais elle ne pouvait pas refuser.
Pendant qu'ils dansaient, les petits morceaux de pain et de viande qu'elle avait cachés dans ses poches tombèrent par terre. Tout le monde se mit à rire, et la princesse voulut disparaître sous le sol.

Elle essaya de s'enfuir, mais le Roi Bec-de-Grive la retint doucement.
"N'aie pas peur," lui dit-il avec un sourire. "Regarde-moi bien. Je suis le musicien avec qui tu as vécu dans la petite cabane. Et je suis aussi le Roi Bec-de-Grive dont tu t'es tant moquée. J'ai fait tout cela pour te montrer que l'orgueil n'est pas une bonne chose, et pour t'apprendre à être plus humble."

La princesse se mit à pleurer, mais cette fois, ce n'étaient pas des larmes de tristesse, mais de regret et de compréhension. Elle avait vraiment appris sa leçon.
Le Roi Bec-de-Grive lui pardonna. Ils célébrèrent leur vrai mariage avec une fête encore plus grande. La princesse, devenue humble et gentille, fut une reine aimée de tous, et ils vécurent heureux pour toujours.

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