Le Lièvre et le Hérisson
Contes de Grimm
Un beau matin, alors que le soleil commençait à peine à réchauffer la terre, Monsieur Hérisson se promenait tranquillement dans son champ. Il sifflotait une petite chanson, content de ses petites pattes qui, bien que courtes, le menaient où il voulait.
Soudain, qui voilà ? Monsieur Lièvre, avec ses longues oreilles dressées et son air un peu moqueur. En voyant Monsieur Hérisson, il ne put s'empêcher de ricaner.
« Bonjour, Monsieur Hérisson ! » dit le lièvre. « Toujours avec tes petites pattes tordues ? Tu dois mettre un temps fou pour aller d'un bout à l'autre de ce champ ! »
Monsieur Hérisson, qui n'aimait pas qu'on se moque de lui, fronça les piquants.
« Mes pattes sont peut-être courtes, Monsieur Lièvre, mais je parie que je peux courir plus vite que toi sur cette distance ! »
Le lièvre éclata de rire. « Toi ? Plus vite que moi ? C'est la meilleure blague de l'année ! J'accepte ton défi ! Que parions-nous ? »
« Une belle pièce d'or et une bouteille de bon jus de pomme ! » répondit fièrement le hérisson.
« Marché conclu ! » dit le lièvre, déjà sûr de gagner. « On court dans ce sillon, jusqu'au bout et retour. »
Monsieur Hérisson rentra vite chez lui. « Femme, femme ! » appela-t-il. « Vite, mets ta plus belle robe, nous avons une course à gagner ! »
Madame Hérisson, qui ressemblait comme deux gouttes d'eau à son mari, ne comprit pas tout de suite. Monsieur Hérisson lui expliqua son plan astucieux.
« Tu vas te cacher à l'autre bout du sillon. Quand le lièvre arrivera, tu te lèveras et tu crieras : "Je suis déjà là !" Moi, je ferai pareil de ce côté. »
Peu après, tout le monde était prêt. Le lièvre se dandinait, impatient.
« Un, deux, trois, partez ! » cria le lièvre, et il s'élança comme une flèche.
Monsieur Hérisson, lui, fit juste quelques pas dans le sillon, puis se cacha.
Quand le lièvre arriva, tout essoufflé, à l'autre bout du sillon, Madame Hérisson se dressa et lui lança joyeusement : « Ah, te voilà enfin ! Je suis déjà là ! »
Le lièvre n'en croyait pas ses yeux. « Impossible ! » haleta-t-il. « Recommençons ! Il doit y avoir une erreur ! »
Et hop ! Il repartit à toute vitesse vers le point de départ.
Mais arrivé là-bas, c'est Monsieur Hérisson qui l'attendait, l'air frais et dispos. « Eh bien, tu en as mis du temps ! Je suis déjà là ! »
Le lièvre était stupéfait. « Mais... comment ? Encore une fois ! »
Et il courut, encore et encore. Chaque fois qu'il arrivait à un bout du sillon, un hérisson était déjà là, criant : « Je suis déjà là ! »
Le pauvre lièvre ne comprenait pas. Il courut ainsi soixante-treize fois d'un bout à l'autre du champ. À la soixante-quatorzième course, il était si fatigué, si épuisé, qu'il s'effondra au milieu du sillon, incapable de faire un pas de plus.
Monsieur Hérisson et Madame Hérisson se rejoignirent, très contents. Ils avaient gagné la pièce d'or et la bouteille de jus de pomme.
Et depuis ce jour, Monsieur Lièvre n'osa plus jamais se moquer des petites pattes de qui que ce soit. Il avait appris qu'il ne faut jamais sous-estimer les autres, et que l'intelligence peut parfois être plus forte que la vitesse.
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